« Puisque tu es lion, sois le »
Diotime et les lions, 1991, Henry Bauchau
Diotime est issue d’une grande lignée familiale, dont les plus lointains ancêtres étaient des lions. Alors qu’elle grandit, elle rêve de participer à la guerre rituelle qui oppose une fois par an, pendant deux jours et une nuit, les lions et les hommes. Mais cette tradition ancestrale exclut les femmes du combat. Le soutien de son grand-père, la rencontre avec un jeune homme et la bataille avec les fauves vont transformer Diotime, modifier ses croyances et fonder sa puissance.
L’aventure initiatique de Diotime révèle les liens qui nous unissent à nos ancêtres et notre relation à la liberté, à l’animal, au vivant. Cette oeuvre d’Henry Bauchau déploie un regard subversif sur les rôles qui nous sont assignés dans la société.
Adapté au plateau, DIOTIME ET LES LIONS, est un spectacle musical : les danses de Céline Cartillier rencontrent la creation musicale de Nicolas Devos et Pénélope Michel. L’espace scénique est organisé comme un grand atelier ouvert où s’entrelacent récit, images projetées, lumière, danses d’hommes et de lions, chant et musique.
Avec DIOTIME ET LES LIONS, la compagnie Contour Progressif, Nicolas Devos et Pénélope Michel (Cercueil / Puce Moment) se lancent dans un nouveau champ d’exploration. Après la creation des spectacles NOTRE DANSE (2014), LA MALADRESSE (2018) et GIKOCHINA-SA (2018), il s’agit de continuer à étudier les liens entre le corps, la voix, la musique et le récit en créant un spectacle pour le jeune public.
« Nous sommes partis au galop, entourés par ses gardes et ce qui n’était pour lui qu’une chasse après tant d’autres a été pour moi l’ivresse, l’invention de la vie. »
“Par sa mère, Cambyse appartenait à une lignée perse dont les plus lointains ancêtres étaient des lions. Peut-être des dieux lions, car c’est en eux qu’il se reconnaissait. Il avait étendu à tout notre clan ce lien de sang avec les lions. Il en avait étrangement transmis, à mon père et à moi, le culte qui faisait horreur à ma mère et à ma soeur aînée. La lutte avec les lions ne durait qu’une partie de l’année et on ne pouvait s’attaquer qu’à un fauve à la fois. Une fois par an, avait lieu entre eux et nous une guerre rituelle qui durait deux jours et une nuit. C’était la plus grande fête de l’année, il y avait toujours plusieurs morts et de nombreux blessés, mais il n’y avait pas, pour les chasseurs du clan et des tribus voisines, de plus grand honneur que d’y être admis par Cambyse. En grandissant, j’éprouvais un désir croissant de participer à cette fête, j’en ai parlé à ma mère, elle m’a suppliée d’y renoncer en me disant que ce n’était pas la place d’une jeune fille et que la tradition ne le permettait pas. Je pensais au contraire qu’à l’origine de notre clan il y avait eu des déesses lionnes aussi terribles, aussi puissantes que les lions. Je descendais sûrement de l’une d’elles et si, pour des raisons évidentes, il était dans notre guerre interdit de tuer les lionnes et leurs lionceaux, elles prenaient au combat une part redoutable et provoquaient parmi nous autant de morts et de blessures que les mâles.
Je ne pouvais pas renoncer à ce désir. J’en ai parlé à mon père, Kyros immédiatement m’a comprise. Ce n’était pas, m’a-t-il dit, l’esprit ni le coeur qui s’exprimaient dans mon désir, mais le sang. Et le sang est mouvement, mouvement de la vie elle-même qui ne peut s’arrêter qu’à la mort. Je n’étais pas d’âge alors à le comprendre mais, quand il m’a permis de demander à Cambyse l’autorisation de participer à la guerre des lions, je me suis précipitée chez mon grand-père”
in Diotime et les lions, Henry Bauchau, 1991