Par-delà les frontières
Pour sa deuxième édition, le festival FARaway persiste et signe dans sa volonté d’interroger le monde d’aujourd’hui et de demain, au travers d’artistes agitateurs et agitatrices venus du monde entier. Imaginé dans une collégialité inédite par sept structures culturelles rémoises, FARaway se veut plus que jamais un festival pluridisciplinaire, ouvert à l’international et à la création contemporaine ; un festival de spectacle vivant pour secouer les consciences, bousculer les repères, penser et ressentir la complexité du monde, notre relation les uns aux autres.
Dans ce mouvement, l’édition 2021 réunit plus de 30 propositions, aussi ouvertes à la diversité des formes qu’engagées dans les sujets qu’elles abordent.
En théâtre, nombre de projets nous réveillent, nous alertent, nous bouleversent, dans ce monde qui semble désormais être le nôtre. A l’heure où la lutte contre l’homophobie reste un combat de tous les jours, Outside du dissident russe Kirill Serebrennikov, traversé par la figure tragique du photographe Ren Hang, artiste homosexuel chinois qui s’est suicidé à 30 ans, est un fulgurant hymne à la liberté d’être et de créer tandis que le suisse Milo Rau reconstitue au plateau le meurtre barbare d’un jeune gay à Liège dans une pièce coup de poing. Cet engagement fort se prolonge dans les spectacles des Italiens Daria Deflorian et Antonio Tagliarini qui dénoncent les dérives de nos sociétés contemporaines tandis que six auteurs européens se penchent sur le malaise de la démocratie en Europe. Le congolais Faustin Linyekula, pour sa part, revient sur la naissance du Ballet national du Zaïre et les enjeux qui en découlent. Quant au turbulent duo turc Biriken, il livre un regard iconoclaste sur une jeunesse stambouliote en déshérence, au croisement du théâtre, du cinéma et de la téléréalité.
Côté chorégraphique, la rage de vivre des danseurs issus des favelas s’exprime dans Cria, une création ébouriffante de la brésilienne Alice Ripoll et la fougue de l’école barcelonaise It Dansa explose dans quatre pièces contemporaines.
D’autres formes de créations encore viennent bousculer les idées, les genres, les esthétiques. D’une immersion visuelle et sonore dans le rituel de la Lucha libre, forme de catch très populaire au Mexique, à un duo circassien autour de la frontière Etats-Unis/Mexique, d’un portrait du flamboyant catcheur travesti Cassandro aux Lettres d’un continent qui donnent la parole à une nouvelle génération d’artistes africains, FARaway catapulte les frontières et se joue des séparations ordinaires entre les modes d’expression. Faire bouger les lignes, le regard, les certitudes, c’est aussi le credo de cinq artistes contemporains qui nous interpellent à travers le prisme de la performance.
De Simon Senn à Rosalie Schweiker, ces agitateurs et agitatrices nous questionnent sur notre rapport à la société, le genre, le corps, l’altérité... Des thèmes que l’on retrouve dans l’exposition exceptionnelle consacrée à l’artiste suisse Cathy Josefowitz, dont l’œuvre puissante sans cesse parcourue par le motif du corps, dialogue avec celle de la jeune anglaise Susie Green. Ce désir d’ouverture à l’art dans sa diversité se décline dans la programmation musicale : concert d’ouverture du nigérian Emeka Ogboh, jazz ravageur du saxophoniste Leon Phal, envolées lyriques du décalé Re : les Monstres, Electronic Guerilla sur des textes de Burroughs, ciné-concerts déjantés et DJ sets enflammés, l’éclectisme est de mise pour vibrer à l’unisson.
Et parce qu’il est important que dès l’enfance on puisse découvrir le champs immense des arts, FARaway instaure cette année un parcours dédié au jeune public, Little FARaway, qui déploie toute la palette du spectacle vivant pour développer auprès des plus jeunes une approche sensible du monde. Ils pourront rencontrer les enfants des rues de Dakar, vibrer au rythme des chants et danses sud-africains, s’immerger dans la Lucha libre, voyager à Kinshasa, rire et frémir au fil de ciné-concerts et de spectacles débordants d’inventivité, autant d’aventures, à partager en famille, pour rêver, aimer, s’émerveiller. A travers cette deuxième édition, le festival FARaway entend s’adresser à toutes les curiosités, toutes les générations, le temps d’un événement rassembleur où les artistes agitateurs et agitatrices feront des scènes de Reims un espace de dialogue et d’ouverture, de rencontres et de paroles entre acteurs et spectateurs, artistes et citoyens. Face à la crise sanitaire qui bouscule bien des certitudes, l’art et son partage nous apparaissent plus que jamais indispensables pour réaffirmer notre désir d’être ensemble et construire des lendemains plus désirables.
Cédric Cheminaud - La Cartonnerie
Philippe Le Goff - Césaré
Chloé Dabert - La Comédie, CDN de Reims
Serge Gaymard - L’Opéra de Reims
Marie Griffay - Le FRAC Champagne-Ardenne
Bruno Lobé - Le Manège, Scène Nationale
Joël Simon - Nova Villa