Découverte avec Les Évaporés, pièce sur ces milliers de Japonais qui, chaque année, disparaissent pour refaire leur vie dans l’anonymat, Delphine Hecquet, artiste associée à la Comédie, s’intéresse particulièrement à la manière dont chacun construit son identité à travers ce qu’on peut appeler nos héritages invisibles. Nos Solitudes traverse la vie d’une famille sur trois générations, avec ses inévitables non-dits, ses secrets et ses mensonges. À partir d’un travail de recherches  improvisations au plateau, et avec la collaboration de la chorégraphe Juliette Roudet, corps et pensées intérieures tissent le paysage de nos solitudes, qui, pour l’autrice, se construisent déjà au sein de la famille, où l’on peine tant à se dire et à partager.

Extrait 

DA CAPO (Alice enfant)
Le bruit de la sonnette a résonné, un coup lent et long et un deuxième plus bref, comme si le doigt avait glissé par erreur sous la petite plaque avec notre nom de famille écrit dessus. À travers la porte vitrée, on aperçoit une silhouette longue qui s’avance lentement, elle nous ouvre et tout l’éclat de son visage, pur, laiteux, explose dans la lumière.
Quand la porte se referme, c’est l’ombre de maman qui disparaît derrière la paroi vitrée et déformante, on entend déjà le moteur de la Ford Escort et les pneus sur le gravier . Il n’y a qu’elle et moi ce matin et cela va durer environ 1h30.