Personnage principal de nombreux romans, de nombreux films, la piscine privée est un objet de fascination. Objet de luxe. De détente. Objet visuel, désarmant de simplicité, elle irrigue divers imaginaires, des films de Godard aux photographies de Gregory Crewdson, des tableaux de Hockney aux romans de Bret Easton Ellis. De Delon à Burt Lancaster. C’est l’endroit des baptêmes. C’est la scène de drames possibles, de noyades de stars du rock, de scènes de crime, c’est le danger tapi derrière le confort.
François Bégaudeau nous présente ici la chronique acidulée d’une société comme endormie. Nous y suivons Paul, Sarah, Suzanne, d’autres encore, qui voient passer les années, les fêtes, les anniversaires, se voyant vieillir et avancer dans la vie, d’apéritifs en siestes, de discussions en souvenirs, au bord d’une piscine. Avec ce motif narratif inquiétant et fantastique : plonger dans une piscine à une période de sa vie, en ressortir dans une autre. Recomposer le puzzle. Et de voir le monde autour de soi offrir ses variations, en nageant dans ses souvenirs. Chemin faisant se dessine le panorama ensoleillé d’un monde de fantômes, ici en maillot de bain d’Ève et d’Adam, drôles et tragiques à la fois. Tout nous invite à la douce et dangereuse dérive de cette société cherchant son Ithaque, de métamorphose en métamorphose.
Les mêmes amis se baignent
Exclamations
Sarah - Elle est tellement transparente !
Bertrand - On en boirait !
David - On s’y baignerait !
Paul - Et pas une once de chlore !
Sarah - Oui c’est vrai ça ne sent pas.
Paul - On doit ce miracle biblique aux efforts conjugués d’une pompe qui aspire l’eau en circuit
fermé, du filtre qui trie les mauvaises bactéries, et des UV qui les tuent.
Sarah - C’est ingénieux. Les hommes sont ingénieux.
David - Et les femmes aussi parfois !
Paul s’amuse à baptiser ses amis.
Paul - Sorj, je te baptise !
Sorj - Mes péchés sont pardonnés.
Paul - Célia je te bénis.
Célia - Merci mon père.
Paul, à Bertrand - Bertrand, je bénis tes parts dans notre affaire.
Bertrand - Bénis aussi les tiennes on sait jamais !
Rires, éclaboussements